Incipit

A l'approche de mes 30 ans, je cèderais volontiers à la tentation de l'examen intime de mon moi, en quête d'une auto-thérapie salutaire. Mais l'exercice serait un peu vain et mégalo. Pour qu'il puisse s'adresser à vous tous aussi, je souhaite transférer les enjeux de mon questionnement personnel à notre contexte actuel global.
Entre le rêve et l'échec, ou quand, en politique comme en amour, la déception semble être l'inévitable issue...
Rassurez-vous, pas de pessimisme absolu en guise de ligne éditoriale, mais plutôt des variations autour des thèmes suivants : dépit / renouveau / trentenaire / conscience politique / résignation / colère / écologie / révolte / rock / partage / émotion / sourire / échec / (re)construction…

mercredi 14 mai 2014

Enfermé en soi


Je lis. Je lis. Je lis. Je me noie dans les romans. Prendre les mots des autres, jusqu’à ras bord.

L'impression d'être bloqué en dedans, paralysé, sans élan. Recul sur soi en sourdine. Jusqu’à devenir sourd. Ne pas savoir ce qu'il faut penser. Ne pas savoir s’il faut penser. Savoir, ou se persuader, que penser c’est le chemin vers le Mal. Savoir que « c’est au printemps que je sombre ». Ne pas être triste, trop triste au moins. Se forcer à ne pas penser, sans même le faire exprès. Ce n’est pas se forcer en fait, ça vient de l’intérieur. Fuite intrinsèque de ma pensée. Partir à Montpellier comme ça. Un peu d’évasion, ou de fuite. Répondre à …, comme ça. Ecouter Deportivo fort, très fort, comme ça. Comme porter des œillères. Pas de son, pas d'image, pas de pensée. Du moins, propres. Propres, de propre à soi.

Remplir. De sons. De mots. Pas les miens. Pas ceux de l’intérieur. Ils sont inaudibles.

Rétention auto-entretenue d’information. Entropie maximale. Merci Aurélien Bellanger. Un mot nouveau dans le vocabulaire. Mot qui reste impénétrable quand même. Ou dont j’entretiens la méconnaissance. Comme je m’évertue à me méconnaître. Ce que je veux. Ce qu’il faut, être ou faire. Doit-on savoir ce qu’il faut être ou faire ? S’assumer. Même si c’est pas dans les plans. Ou assumer sa connerie, sa peur, sa perversion. Assumer d’avoir envie de rire. Assumer d’avoir la pêche physiquement. Assumer d’être seul. Même si c’était pas dans les plans. Ou si ça avait trop été dans les plans. Réminiscence d’adolescence, où vraiment je sentais que j’étais pas « dans les plans ».

Il est tard, déjà. Demain il sera encore plus tard. Les années n’attendent pas pour passer.
Mourir en jouissant. Vivre pour jouir. Libre et indépendant. Ivre et pédant. On aura « eu mieux que du chagrin, on rentre, on rentre ». On aura eu du chagrin. On l’aura fui. On l’aura dépassé par ce qui est, un temps, des temps, mieux que du chagrin. A la fin il restera les rires, les doutes, les regrets, les remords, la solitude. Et du chagrin sûrement. Et des rides. Et un air vieilli. Et des tissus nécrosés.

Et une jolie nostalgie, une tristesse drôle. De ça on ne tirera rien. De ce billet de blog. De la vie. On ne tirera rien. On ne se changera pas. Accepter. S’accepter.
 
Bande-son : Pigeon John, Dragon slayer (2010) ; Thomas B., Shoot (2014)